Rock & Folk, March 1981

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La petite merveille blanche


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  Philippe Garnier

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«Why d'you wanna be my friend / when I feel like a juggler runnin' outta hands?»

Pourquoi tient-on à être son ami alors que lui se fait l'impression d'être comme un jongleur à court de mains ? Bonne question, ça. Et je connais beaucoup de rameurs et ramiers de la chansonnette qui seraient prêts à en donner une, leur main droite, même, pour avoir ne serait-ce qu'une fois dans leur carrière écrit des paroles de cet acabit. Costello, lui, nous a sorti ça dans une de ses premières chansons (« Welcome To The Working Week »). Et il a continué. C'est une des raisons, je suppose. Une autre raison aussi, c'est que Costello n'est plus seulement ce personnage à la Jimmy Olson (ou serait-ce Clark Kent ?) qu'il nous présentait au début, ce binoclard chétif et revanchard qui le temps d'un disque ou d'un concert revêtait son spacesuit (en l'occurence des pantalons à la Jerry Lewis, un veston de chez Marks & Spencer et une Fender Jazz) pour régler ses comptes avec les méchants du monde entier : maisons de disques, sa femme, les femmes en général, les parents, le gouvernement, etc... L'effet était saisissant. Il ressemblait plus à un Eddie Cochran frappé de polio qu'à autre chose, mais l'image et la considérable qualité de ses chansons étaient grandement suffisantes pour en faire le Modèle de l'Année (77). Enfin, en 77 il y avait bien l'autre Pourri, mais on ne pouvait pas trop compter sur Genghis Khan pour chausser les grolles de QUI QUE CE SOIT. Pour les maisons de disques, les fans et la radio, Costello semblait bien constituer le meilleur pari ; entre deux maux, celui-ci paraissait moins dangereux, plus digeste. Ce en quoi toutes les parties concernées se gouraient horriblement, mais ça il n'y avait pas trop moyen de savoir. Certes, Johnny Rotten est redevenu John Lydon et il poursuit sa démarche radicale au-dessus de tout soupçon, intransigeante et admirable ; mais, euh, loin du marché, disons... Deelan McManus, lui, a gardé son nom d'emprunt (difficile de le blâmer pour ça) et s'est mis à étonner tout le monde par son incroyable prolixité, ses esclandres et la merveilleuse qualité de ses disques. Pire, il est indéniablement devenu celui que tout le monde attend au tournant ; celui qui, pour le meilleur et pour le pire, assume à la fois le rôle que Dylan et les Beatles jouaient pour tout une génération. Je ne veux pas dire qu'il écrit ou chante comme eux, et je ne voudrais surtout pas l'ensevelir sous des comparaisons commodes et vaseuses, mais le fait est qu'il n'y a pas grand-monde, en ce moment, qui opère sur une telle échelle ; et surtout très peu de chanteurs dont les chansons peuvent supporter d'être épluchées une à une sans pour autant crouler sous le ridicule ou la pesanteur. Et en plus j'ai l'intime conviction que beaucoup de jeunes personnes s'esquintent actuellement les oreilles et se ruinent l'entendement au fond de leurs chambrettes à essayer de déchiffrer ce que susurre ou éructe l'animal dans ses chansons. Je veux dire, il se pourrait que beaucoup de monde apprenne l'anglais à cause de lui, tout comme Dylan a servi de Webster et de Méthode Berlitz à un tas de gens comme moi. Et comme les paroles du Petit Maître ne sont pas exactement évidentes-évidentes, ils apprécieront peut-être un discret coup de main.


CLOWNTIME IS OVER

En choisissant son nom, il a pris celui d'un roi et celui d'un clown. Ironie, dérision peut-être. Costello, c'est la moitié d'un duo de comiques hollywoodiens ; c'est aussi le nom d'un petit chef mafioso habitué à jouer des coudes, Frank Costello. Et Elvis a un peu de tout ça : lui et son manager Jake Riviera (blase qui ne sonne pas exactement comme un extrait de naissance non plus, d'ailleurs...) sont assez connus pour leurs méthodes de gorilles et leurs façons pas toujours très appréciées de disposer des photographes et de la presse en général. Et si Costello déteste la presse, la presse le lui rend bien généralement. Les échauffourées ne se comptent plus. Et quand une certaine Bonnie Bramlett s'en est allée moucharder au sujet du fameux épisode de Columbus, Ohio, toute la presse s'est fait un plaisir d'amplifier ce qui n'était après tout qu'une conversation d'ivrognes, ou au mieux un concours d'injures. L'incident a. fait couler trop d'encre pour qu'on le répète en détails (cf. R & F n° 161). Notons seulement que les pisse-copie se sont bien gardés de rapporter les autres injures échangées dans le bar du Holiday Inn. L'infâme Elvis a peut-être traité James Brown d'« uppity nigger » et Ray Charles de nègro ignorant pour faire chier toute une bande de has-beens qui ont passé leur triste carrière à singer la musique noire, mais il a aussi traité Steve Stills de « Nez-de-Fer », par exemple (ce que je trouve assez bien trouvé), et la Bramlett ne s'est pas gênée pour traiter tous les angliches d'« impuissants » (ce que je trouve d'une platitude navrante mais somme toute caractéristique). Enfin. Inutile d'en faire un plat. Comme dit Costello avec son habituel et étonnant talent pour trouver les points sensibles : « Bramlett a déjà tiré tout ce qu'elle a pu de son association avec un E.C:, qu'elle ne compte pas sur moi pour faire la même chose... »

Mieux que ça, Costello en a tiré une bonne chanson qui mêle l'insolence à quelque chose de plus profond, de plus attachant aussi : « When the heat gets subtropical / and the talk gets so topical / You can read me the riot act... » Et plus loin : « Pourquoi toutes ces stupides idioties / Alors que j'aurais l'esprit plus en repos / Au lieu de toute cette insolence bête, mais bête / Donnez-moi encore plutôt l'amnésie (...) Maintenant on va dire que je me fous / De la couleur sous laquelle cette histoire me peint / Essayer de tout le temps jouer les durs / Est assez dur comme ça / Me faites pas rigoler / A me faire la leçon / M'en faites pas tout un plat / Alors que vos remarques sont bien à la légère. » Et pour ces dernières lignes, on devrait m'envoyer entre les pattes de la Goon Squad ; mais comment traduisez-vous quelque chose d'aussi malin que « Don't put your heart out on your sleeve / When your remarks are off the cuff » ? Pas exactement une histoire de manchettes...

Et pourtant, l'épisode a fait la une. On a même été jusqu'à interviewer Ross McManus à Liverpool ; et l'ancien chanteur de jazz et trompettiste du Joe Loss Orchestra (en Angleterre, on imagine un peu ce que cela veut dire) de déclarer farouchement : « Elvis n'est pas raciste ; il n'a pas été élevé comme ça ! » Bien sûr que non, Mr McManus. Mais la plaisanterie n'est pas sans rappeler l'époque où on allait jusqu'à faire enregistrer des « Beatles novelty tunes » à Freddy Lennon (jamais eu le douteux plaisir d'entendre l'atroce et sentencieux « Next Time You Feel Important » ? Un B-side sur Jerden Records qui vaut son pesant de cruelle ironie... C'est Lennon Senior qui méritait les balles...). Il est également bon de rappeler qu'à l'époque de leur succès et de leur service actif, avant d'avoir définitivement rejoint le Calendrier des Saints, les Beatles étaient constamment en butte aux coups vaches de Fleet Street. Ils n'étaient pas les seuls, bien sûr, mais ce que je veux dire c'est que la hargne journalistique, ou cet amour/haine qui se développe entre la presse et les artistes trop importants pour être ignorés mais trop arrogants pour être épargnés, toutes ces réactions indiquent généralement que l'artiste en question fait quelque chose de vital — sur le moment, du moins.

Ce qui ne veut pas dire que Costello et consorts ne se soient pas conduits comme une bande de Huns pendant une grande partie de la Tournée Armed Forces. Après tout, la troupe se déplaçait dans un bus arborant « CAMP LE JEUNE » sur ses flancs, et à plus d'un titre Costello, Riviera et Cie ont fait plus de ravages qu'une compagnie de Marines durant cette tournée américaine, s'aliénant à la fois les stations de radio, les promoteurs, parfois le public et toujours bien sûr les journalistes. Parfois les outrages étaient concertés et géniaux ; parfois ils étaient seulement stupides et un effet de la personnalité nettement coincée du grand fautif. Mais une chose est sûre, c'est que dès le début Costello a été certain de pouvoir se permettre ce genre de corde raide, pour une simple raison qu'il explique dans « Red Shoes » sur un petit air de triomphe et de sweet revenge : « Oh, I used to be disgusted/ And now I try to be amused / But since their wings have got rusted / You know, the angels wanna wear my red shoes » (« Oh, avant ça me dégoûtait / Et maintenant j'essaie de trouver ça drôle / Mais depuis qu'ils ont les ailes rouillées / Eh bien les anges ils veulent porter mes chaussons rouges »). Inutile, je suppose, d'épiloguer sur qui sont ces anges. Rust never sleeps.

Et comme s'il était besoin de rendre les choses encore plus claires, Costello prend la peine de nous asséner cette dernière déclaration d'intention — à un stade de sa carrière où il peut véritablement être fier de lui. C'est sur son dernier album, « Get Happy », et cela s'intitule « Clowntime Is Over » : Clowntime is over / Time to take over / While others just talk and talk / Somebody's watching where the others don't walk / / While ev'rybody's hiding under covers / WHO'S MAKING LOVER'S LANE / SAFE AGAIN FOR LOVERS ? (« Terminé les clowneries / Il est temps de prendre les choses en main / Pendant que les autres ne font que de parler / Quelqu'un s'occupe de là où les autres ne s'aventurent pas... Pendant que tout le monde se cache sous les couvertures / C'est grâce à qui si les amoureux / Peuvent de nouveau se sentir tranquilles dans leur coin ? ») Qui donc, on se le demande. Et qui sont les clowns ? Ça, on préfère ne pas se le demander. Le plus beau c'est que Costello a une énorme dette envers tout un passé musical ; et ce n'est que récemment qu'il s'est mis à l'admettre avec une bonne volonté relative. Il y a évidemment les Brinsleys, les vieux pères du pub-rock et toute la grande Synthèse Américaine (l'ultime coup de chapeau viendra quand Costello sortira un simple sous le nom de Nick Lowe, l'auteur de ce bon cheval de bataille qui a fait longtemps partie du répertoire de Brinsley Schwarz, « What's So Funny 'bout Love And Understanding ? »). Mais il y a aussi le tonnerre de la merseybeat : « Get Happy » contient une ronflante reprise d'un obscur B-side des Merseybeats, justement. L'année dernière Costello et les Attractions en avaient fait un des sommets de leurs concerts : « I Stand Accused ». Et, bien sûr, la filière soul et country, qui sera amplement illustrée dans ce qui va suivre. Mais à ses débuts, et malgré son nom d’emprunt, Elvis insistait pour n’être le fils de personne. Blame it on Cain.

LIP SERVICE (is all you’ll ever get from me)
La prolixité et le débit de Costello ne sont rien moins que prodigieux. D’après les dires de Bruce Thomas, le bassiste des Attractions qui partage sa chambre avec lui en tournée, Costello est un insomniaque invétéré qui passe ses nuits à écrire. Nick Lowe déclare souvent d’un air désabusé qu’Elvis " a des centaines de chansons en réserve, mais moi je ne garde que les hits, enfin, que ceux qui me paraissent pouvoir devenir des hits ." Bien sûr, le nombre affolant de disques sortis par Costello est autant le résultat de sa créativité galopante que de la fantaisie des deux charlatans notoires, Lauder et Riviera, les deux joyeux drilles qui ont présidé successivement aux destinées de Stiff, Radar, et à présent F-Beat, et dont les pratiques décidément lapinis tes risqueraient de pousser le collectionneur sérieux soit un suicide, soit à l’homicide, si cette engence n’était pas si masochiste pour commencer. On compte à cejour pas moins de cinq albums, dix simples, deux EPs, un maxi-EP, quatre simples gratuits, un album en public de promo (le fameux « Live At The Mocambo »), plus les innombrables bootlegs et la récente compilation de B-sides et autres perles introuvables sortie par CBS-USA. Sans compter non plus toutes les galettes qui se chevauchent, partiellement ou non. Depuis la sortie de «Taking Liberties », peu de plages restent rares ou introuvables. En tout cas pas indispensables (seuls les incurables feraient des pieds et des mains pour des choses comme «Neat Neat Neat » ou les deux chansons live du Stiff Tour). Il y a quelque chose de beaucoup plus utile, par contre: c’est le fameux double-bootleg sorti il y a deux ans, «50 000 000 Elvis Fans Can’t Be Wrong », surtout pour le premier disque qui contient les démos Radar et quelques-unes des premières répétitions avec les Attractions enregistrées sur un 4-pistes quelque part en Cornouailles. L’équivalent des « Basement Tapes », si on veut... Ce qui pourrait évidemment paraître d’une inconséquence et trivialité monumentales (tout est relatif), mais il n’est tout de même pas inintéressant d’entendre Costello chanter seul avec sa guitare des choses comme « Hoover Factory » (version différente de celle figurant au dos du récent Clubland ») ou « You Belong To Me », ou encore l’entendre éructer «Mystery Dance» avec pour tout accompagnement une... batterie. Pas inintéressant, parce que c’est justement ça qu’ont dû entendre tous les A & R et autres gros pleins de soupe des maisons de disques deLondres en 1976, quand McManus-pas -encore-Costello défilait devant eux et poussait la goualante debout devant leur bureau. A entendre ces petits joyaux pop on ne peut que conclure qu’ils avaient décidément des oreilles en zinc, tant le potentiel des chansons saute à la figure. Signalons également au passage que, dès le début, Costello a été intensivement piraté, en Europe comme aux Etats-Unis, à un degré que seul Dylan et quelques autres semblent devoir dépasser.
Le rock n’a jamais été une affaire très sérieuse, et vraiment peu d’artistes méritent l’épluchage systématique dont on a bien voulu les honorer à une époque ou à une autre. C’était peut-être plus compréhensible au temps où le rock était une obses




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Rock & Folk, No. 170, March 1981


Philippe Garnier profiles Elvis Costello.


F.G. sounds off about F-Beat's lack of a distribution deal in France.

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Et nous?


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  F.G.

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Scandale & Frustration Rage & Incrédulité ! Que je vous explique : la merveille du mois ne se trouve pas dans la rubrique Disques sur trois colonnes avec épithètes et exégèse et tout. Je parle du nouvel album d'Elvis Costello, qui s'intitule « Trust « (oui, je sais, ça fait drôle au début). Sortie en Angleterre tout ce qu'il y a de plus normale, sur F-Beat Records. L'absurdité vient de ce que le sus-nommé label n'a de contrat de distribution avec AUCUNE maison de disques en France. Si « Get Happy », le précédent, était paru chez CBS, c'est que la négociation se fait au coup par coup, le contrat n'étant pas renouvelé par la suite. De même que pour le récent LP de ROckpile, CBS s'est complètement désintéressé (pour des raisons non connues) du cas F-Beat, ou l'inverse. Et pour l'heure, aucune autre compagnie n'est sérieusement sur l'affaire. Et il faut que cela frappe les meilleurs ! Parce que faute de critique extensive, j'aimerais vous toucher un mot de « Trust », qui, aux premières écoutes, avant d'en découvrir tous les trésors, offre un compromis plus que réjouissant entre la munificence contenue du sous-estimé « Armed Forces » et l'intensité touffue du mésestimé « Get Happy » ; avec ces petites pièces intimes et magistrales capables de ravages émotionnels sans pareils. En quatorze pop songs insidieuses, Costello trouve moyen d'encore enrichir sa vision — unique — et notre passion. Joie & exaspération. Il serait lamentable que tout le monde ne puisse en profiter, il est indispensable que la situation soit débloquée. Ceci est un appel pressant. —



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