Rock Sound, April 1994: Difference between revisions

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''Votre premier disque s'appelait ''My Aim Is True''. Quel était votre but justement à cette époque{{nb}}?  
''Votre premier disque s'appelait ''My Aim Is True''. Quel était votre but justement à cette époque{{nb}}?  


C'était juste un titre, pas une déclaration philosophique... mon objectif - plutôt que mon but - à l'époque, était de faire un disque, parce que j'attendais ça depuis pas mal de temps. Je n'avais aucune idée précise de carrière, savoir si ça durerait un an ou cinquante ans... Maintenant, je crois que j'irai jusque vers cent deux ou cent trois ans, puis je commencerai à ralentir un peu (sourire)...  
C'était juste un titre, pas une déclaration philosophique... mon objectif plutôt que mon but à l'époque, était de faire un disque, parce que j'attendais ça depuis pas mal de temps. Je n'avais aucune idée précise de carrière, savoir si ça durerait un an ou cinquante ans... Maintenant, je crois que j'irai jusque vers cent deux ou cent trois ans, puis je commencerai à ralentir un peu (sourire)...  


''Et comment analysez-vous votre carrière{{nb}}?  
''Et comment analysez-vous votre carrière{{nb}}?  
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''Vous avez beaucoup écrit sur le sentiment de frustration. Considérez-vous la musique comme une forme de thérapie{{nb}}?  
''Vous avez beaucoup écrit sur le sentiment de frustration. Considérez-vous la musique comme une forme de thérapie{{nb}}?  


Non, pas dans le sens moderne du mot... Mais la musique peut correspondre parfaitement à un moment d'émotion qui sera mieux supporté : par exemple, dans un moment de tristesse, écouter une chanson qui traite du  
Non, pas dans le sens moderne du mot... Mais la musique peut correspondre parfaitement à un moment d'émotion qui sera mieux supporté : par exemple, dans un moment de tristesse, écouter une chanson qui traite du même sentiment peut, bizarrement, vous sortir de cet état dépressif. C'est le cas du blues, de certains morceaux, même dans la pop music. Beaucoup de morceaux ont cette évidente connection avec un monde "spirituel" disons, sans être forcément religieux. Ce matin, j'écoutais du Beethoven ; je ne suis pas particulièrement religieux, mais cette musique est tellement inspirée par la foi qu'on sent cette inspiration "spirituelle", vitale et émouvante... En ce sens, la musique n'est pas thérapeutique, mais elle a ses effets d'accompagnement, d'émotion, de réconfort, et ce n'est pas toujours confortable ; la musique peut aussi en même temps nous secouer{{nb}}!


''Certains musiciens utilisent la musique comme une auto-analyse...


Oui, moi-même, j'ai écrit des chansons très personnelles, mais ce n'est pas forcément fait dans un but d'analyse... Je ne suis pas particulièrement intéressé par moi-même ou l'introspection... Cela a plus à voir avec le fait de tirer de sa propre expérience la matière d'une chanson sincère. mais qui apporte une élaboration musicale... sinon il vaudrait autant chanter son journal intime (rires){{nb}}!


''Comment conciliez-vous cette émotion brute que vous revendiquez et la sophistication grandissante de votre musique{{nb}}?


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D'abord, je ne crois pas que ma musique soit sophistiquée... Peut-être l'est-elle en comparaison de pas mal de productions pop, mais... (silence) Non, je ne suis pas d'accord du tout, ma musique n'est pas sophistiquée. D'ailleurs, même la musique la plus simple peut apporter une émotion qui traduit des sentiments complexes... Par exemple, prenez une chanson comme "I'm So Lonesome I Could Cry" de Hank Williams : elle exprime un sentiment très sophistiqué, mais dit d'une manière tellement simple — phrasé, musique, etc. — que ce n'est pas qu'une chanson triste sur le fait de se sentir seul et triste{{nb}}! Elle est tout aussi sophistiquée que bien des chansons ou des pièces musicales modernes dites complexes... La différence est dans le média lui-même, et aussi le public qui s'intéresse à l'oeuvre...
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''Dans les années 1977 à 1982, vous aviez la réputation d'être une personne en colère ; étaitce un engagement social ou politique{{nb}}?
 
Je crois que cette colère, on l'a en soi... En même temps, je crois que je ne n'étais pas seulement et nécessairement que cela... Cette envie, on l'a parce qu'on éprouve des sentiments passionnés, avec des vues simples et déterminées... et sans doute aussi un sens de l'agressivité dans certaines chansons. Mais définir ces chansons par la colère seulement est totalement faux et réducteur{{nb}}! S'il n'y avait eu qu'une seule émotion exprimée, le disque aurait été plutôt insupportable (rire)... Disons que la colère a été, parmi les émotions exprimées, celle dont on a le plus parlé...
 
''Quelle part votre musique puise-t-elle selon vous, dans vos racines celtiques{{nb}}?
 
Je ne crois pas qu'il y en ait une... Mon arrière grand-père était certes irlandais et je vis en Irlande aujourd'hui, mais je ne vois pas en quoi cela marquerait ma musique plus que d'autres éléments de ma vie... A-t-on un penchant et des dispositions naturels pour la musique en Irlande{{nb}}? (rire)... Croire qu'un pourcentage de sang de telle sorte donne un don pour la poésie serait d'un ridicule{{nb}}! (rire)... Sinon personne ne travaillerait chez nous, et tout le pays chanterait à longueur de journée (rire)...
 
''Beaucoup de vos chansons sont traversées par votre sens de l'humour...
 
Oui, et sans doute est-ce moins facile à saisir en France à cause de la langue... C'est impossible de démonter le mécanisme de l'humour, sinon ça ne fonctionne plus. Il y a différentes façons de l'exprimer : certaines blagues te secouent et te font pisser de rire, d'autres apportent juste la petite lumière qui fait que la vie est un peu plus supportable. Et dans les chansons, c'est difficile, parce que quand on a entendu la blague une ou deux fois, on se lasse... Mon humour se trouve aussi dans des chansons comme "My Science Fiction Twin", où à l'évidence, le côté fantasque l'emporte sur la réalité, ce qui crée un petit décalage, et si on loupe cela, la chanson peut paraître plutôt mystérieuse{{nb}}! (rires). Certains morceaux sont plus ouvertement humoristiques, comme "This is hell" sur cet album ou "God's Comic" sur ''Spike'', mais l'humour se perd dans les traductions, inévitablement...
 
''Certains de vos albums ont été ignorés des médias chez nous, comme ''Almost Blue'' ou ''Goodbye Cruel World'', et même ''Spike'' ou ''King of America''. Or, avec le recul, l'importance de ces disques est évidente dans votre carrière. Savez-vous pourquoi les critiques les ont boudés{{nb}}?
 
Je crois que ça prouve leur incroyable manque de goût et l'envergure de leur incompétence (rire)... que puis-je dire d'autre{{nb}}?
 
''Mais ces albums avaient un lien entre eux...
 
Oui{{nb}}!... Et vous savez quel lien{{nb}}? Ces albums ont surtout eu en commun d'être presque totalement ignorés par les média en France (rires)...
 
''Vous sembliez très concerné par l'évolution du rock 'n' roll dans les 80's, beaucoup moins maintenant, pourquoi{{nb}}?
 
Je ne suis pas sûr de comprendre la question en relation avec ma propre musique... peut-être que je suis moins concerné par une seule forme de musique, parce qu'avec le temps, il y a plus de possibilités de diversification qui se sont présentées à moi. Mais je n'ai jamais été particulièrement obsédé par l'évolution du rock 'n' roll, d'ailleurs, c'est une forme musicale très limitée, et c'est ce qui en fait sa force en même temps. Mais il y a d'autres formes de création, d'autres apports possibles dans la rythmique ou l'instrumentation qui sont tout aussi intéressants, comme ce que j'ai essayé dans l'album ''Spike'', mais il est vrai qu'en France vous ne l'avez pas remarqué (rires)... En tout cas, ce qui maintient la musique vivante, c'est l'essai de nouvelles sonorités... Mais le rock 'n' roll n'est pas quelque chose qui évolue en soi, ça c'est une invention du magazine ''Rolling Stone'' (rires)! C'est comme le Hall Of Fame : si on l'établit, il faut bien y mettre quelqu'un dedans, même quand on a attendu le moment où les gens sont reconnus par tous... quelle idée stupide
 
''Considérez-vous votre album ''King of America'', comme un tournant important dans votre carrière{{nb}}?
 
D'une part, c'est un album plein de compassion, de générosité, et d'autre part, c'est le premier pour lequel j'ai travaillé avec beaucoup d'autres musiciens, il y avait donc des apports extérieurs, avec des structures de formes musicales déjà existantes, comme la country, le rhythm'n'blues, les ballades, le rockabilly, etc. On n'a pas cherché à créer de formes nouvelles. De même, quand j'ai fait ''Almost Blue'', j'ai déjà dit que j'aurais pu écrire les chansons en adoptant la forme country tout en cherchant à m'exprimer ; pour ''King of America'', j'en étais plus proche, ce n'est pas un truc pour me déguiser avec un chapeau de cowboy (rires), mais ça correspondait aux sentiments exprimés, la tendresse, les regrets, des émotions qui n'auraient pas correspondu à un rock 'n' roll hurlé... C'est parce que mes compositions sont, dans une inspiration qui peut être presque spontanée, choisies et élaborées de manière consciente.
 
''On sait que vous êtes un proche de T-Bone Burnett, qui a produit "King of America". Que vous êtes-vous appor-té réciproquement{{nb}}?
 
On a passé pas mal de temps sur la route et on a eu le temps de dis-cuter le fondement des chansons, ce que les gens appellent la motivation ou la psychologie d'un morceau. On a parlé plus que je ne l'ai fait avec aucun producteur, même pas Nick Lowe qui avait produit un de mes premiers albums... T{{nb}}Bone s'est attaché à l'expression et à l'idée très claire que j'avais de chaque chanson, même si lui ne la réalisait pas exactement, il avait confiance. Et avec T{{nb}}Bone, le côté musical était très simple, il s'agissait d'enregistrer les musiciens sans effets spéciaux, sans production envahissante... Donc, de donner un album très vrai, très direct, qui soit une image très proche de la performance réelle. L'album était plus concentré sur l'expression que sur les circonstances extérieures de sa réalisation.
 
''On a été étonné quand vous avez collaboré avec Paul McCartney ; y avaitil une raison particulière{{nb}}?
 
Je ne peux pas contrôler la façon dont les gens perçoivent la carrière de Paul aujourd'hui, et ça ne m'intéresse pas... La raison{{nb}}? Simplement, on l'a fait, c'est tout, et je suis content car je pense qu'on a fait ensemble deux"ou trois chansons qui sont au moins aussi bonnes que les miennes ou les siennes... Et il n'était pas question de rivaliser avec celles qu'il a composées avec John Lennon ; c'était impossible, ce genre de combinaison n'arrive qu'une fois par vie, quand elle arrive{{nb}}! Même si on sait aujourd'hui que beaucoup des dernières chansons n'étaient pas directement issues de cette collaboration, les circonstances du groupe étaient vraiment uniques... Pour moi, cette rencontre avec Paul est une occasion de plus de composer et penser différemment.
 
''Vous aimez beaucoup les pseudonymes et les masques, The Imposter, Napoleon Dynamite, Emotionnal Toothpaste etc. Est-ce aussi une marque d'humour{{nb}}?
 
Oui, je pense que oui. Les gens ont exagéré l'importance de tout cela ; là encore, il ne faut pas chercher de signification psychologique cachée{{nb}}! Que penser de Count Basie, Duke Ellington, Johnny Rotten, etc.? Le showbiz a toujours été un monde de faux noms ou de jeux de mots... Et pour présenter quelque chose au public, "Elvis Costello" sonne bien, non{{nb}}? Même si, parfois, on attache des clichés ou des attitudes au pseudo... Et je ne vois rien d'extraordinaire à prendre un faux nom pour sortir un album, ça secoue un peu les choses, et les gens ont à penser... Mais il n'y a rien de sombre ou de mystérieux làdessous...
 
''En 1989, dans une interview, vous disiez ne pouvoir écrire que sur des sujets tristes et des épisodes dramatiques d'une vie, est-ce encore vrai{{nb}}?
 
Je devais exagérer un peu ou avoir dit que ces sujets m'inspiraient plus... Quand on écrit sur soi ou les autres, les situations les plus impressionnantes sont souvent celles qui sont troublantes, dérangeantes, et pas souvent gaies... Encore que même la joie puisse parfois être déstabilisatrice à sa façon.
 
''Qu'avez-vous ressenti face à la critique qui a peu apprécié ''Juliet Letters'', vous reprochant de devenir "sérieux et intello"{{nb}}?
 
Vraiment{{nb}}? Je ne lis pas le français... Mais c'est fascinant{{nb}}! (rire). Que dire{{nb}}? D'abord, les critiques n'ont pas acheté l'album et n'ont même pas payé leur place au concert, alors... Quant à l'album, il s'en est déjà vendu un quart de million d'exemplaires, ce qui est considérable pour un disque de musique de chambre. Je n'ai pas de problème avec cette critique. Si elle a envie de démolir l'album, c'est son droit, mais ça n'est pas un gage de vérité pour autant...
 
''Ce serait plutôt un faux procès d'infidélité au rock 'n' roll{{nb}}?
 
Je ne sais pas... encore une fois je ne peux pas lire ces articles. Mais, et ce que vous me dites confirme les impressions de mes visites précédentes, l'ensemble de la critique me paraît à la fois faussé et limité dans son appréciation de la qualité en musique. De la même manière, et pour généraliser un peu, les Français pensent que si tu es en train de crever de la came, tu deviens intéressant ; ils trouvent même Jerry Lewis amusant{{nb}}! Il y a bien sûr une culture française de qualité, mais à côté de cela, cette culture américaine qu'on semble apprécier ici est vraiment du domaine du mystère et de la farce pour le reste de l'Europe. Il faut en être conscient et s'en méfier. Et cette attitude générale se retrouve dans la manière d'aborder ''Juliet letters''. C'est arrivé également en Angleterre, dans une certaine mesure : on m'a reproché d'être sorti de ma petite boîte{{nb}}! Mais la vie est trop courte à mon goût pour ne pas avoir envie d'autre chose{{nb}}! J'avais envie de le faire, de travailler avec les gens du quartet Brodski, sans autre prétention que de faire de la musique avec passion ; et ça, c'est notre droit, les critiques peuvent aller se faire mettre, ils n'empêcheront pas des centaines de milliers de personnes d'avoir partagé cette même envie; même si tous n'ont pas aimé le disque, au moins ils ont été concernés, ils ont essayé quelque chose... De même, la tournée mondiale a été un succès et l'atmosphère n'avait rien à voir avec celle que la critique croit voir autour de la musique classique, tout cela est faux{{nb}}! Et si je conçois à la rigueur que l'album seul ait pu les déconcerter, le succès sur scène prouve que ces critiques n'ont rien compris ou rien perçu. Et de quel droit peuvent-ils prétendre déterminer ce que je dois faire, ce à quoi ils m'autorisent, etc.{{nb}}? Quelle arrogance de leur part{{nb}}!
 
Brutal Youth ''marque-t-il la fin d'une certaine période d'introspection{{nb}}?
 
Non, je ne fais pas ce genre d'analyse ou de décision. Pendant que j'écrivais, je pensais aussi à l'enregistrement. J'ai tenté de jouer de tous les instruments que je pouvais maîtriser, puis, en constatant mes limites, j'ai essayé de trouver les meilleurs musiciens pour le faire et il est apparu que c'étaient des gens avec qui j'avais travaillé avant, les Attractions et Nick Lowe. Et bien qu'ayant Mitchell Froom qui a coproduit, l'influence de ces musiciens a été déterminante. Cela n'a rien à voir avec un début ou une fin de phase artistique. A l'évidence, le son de cet album est différent des ''Juliet Letters'' ou des précédents. Mais c'est cette diversité que j'aime. Un de ces jours, j'en ferai peut-être un avec des sections de cuivres, ou un album réunissant des compositions que j'ai écrites pour d'autres artistes. Et même si ''Spike'' n'a pas été apprécié en France, je considère que c'est un bon album.
 
''Etait-ce facile de retravailler avec les Attractions?
 
Oui, très facile. On ne s'était pas vu depuis plusieurs années, mais chacun apportait ainsi un peu de nouveauté, de son expérience. Pareil avec Nick Lowe qui tient la basse sur sept morceaux.
 
''"Sulky girl" est évidemment le premier single...
 
Oui, et il est monté directement 22 dans les charts en Angleterre{{nb}}! Je ne m'attendais pas à avoir un hit avec un single, parce que ce marché s'adresse plutôt aux jeunes, et je ne crois pas que les jeunes se sentent proches de moi, je n'ai jamais rien fait pour lés séduire, et j'aime l'âge que j'ai. En tout cas, aujourd'hui, on voit des gens de cinquante ans qui écoutent du rock 'n' roll, du Eric Clapton, de la musique intéressante en soi mais un peu "coffee table".
 
''Vous allez tourner{{nb}}?
 
Oui, on passe même à l'Olympia cet été, mais on tourne aux USA à partir du mois de mai avant de venir en Europe -Angleterre, Danemark, Pays-Bas, etc. Après, on verra si on a encore envie d'être ensemble ou pas; on s'arrêtera peut-être ou on fera un disque au Japon, je ne sais pas...


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<!-- pull quote: "Une chronique de disque me touche si elle est  
<!-- pull quote 1: "Une chronique de disque me touche si elle est  
profondément personnelle, si elle traduit une émotion ; mais je me fiche de savoir si c'est culturellement post-moderne ou post-punk, ce ne sont que des étiquettes sans intérêt ni signification..." -->
profondément personnelle, si elle traduit une émotion ; mais je me fiche de savoir si c'est culturellement post-moderne ou post-punk, ce ne sont que des étiquettes sans intérêt ni signification..." -->
<!-- pull quote 2: "Je ne suis pas sûr de savoir ce qu'est exactement la musique rock aujourd'hui, même si j'apprécie le R'n'R, ses racines des 50's et certains de ses développements à l'époque des Beatles par exemple. De temps en temps, un groupe revitalise des structures qui paraissent complète-ment épuisées..." -->
<!-- pull quote 3: "En règle générale, les situations dramatiques apportent un meilleur matériau pour écrire une chanson. Peut-être, un jour, surprendrai-je tout le monde en écrivant un album de chansons d'amour idéalistes..." -->


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Elvis Costello: Bons baisers d'albion


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   Yves Bongarçon

On le croyait calmé, assagi, plus concerné. Pire, blessé. Non Madame. Elvis est bel et bien là, fidèle au poste. Bon pied, bon oeil. Et pas content, comme d'hab'. La sortie du bois s'agrémente cette fois encore d'un album, le séminal Brutal Youth, où Declan Patrick Aloysius compte ses amis et ses fidèles en même temps qu'il remet son ouvrage (période Get Happy) sur le métier. Gilet tricoté main (Cait ?), grosse veste de clergyman, chemise boutonnée jusqu'au col, sourire narquois, aigreur chevillée à l'âme, MacManus parle de ce qui l'intéresse, ironise quand l'envie lui en prend et envoie chier la critique. En pleine forme, quoi.

Seize ans de carrière, quinze albums, n'est-ce pas trop ?

Non, pourquoi ? C'est mon boulot d'écrire des chansons et de les interpréter. Je suis comme tous les gens qui vont au boulot tous les jours, c'est tout. Et moi, il faut que je travaille tous les jours... Quand j'ai commencé, les disques sortaient plus souvent, on écoutait un nouveau truc tous les six mois. Moi, j'aimerais en sortir un toutes les six semaines, il y aurait ainsi moins de tension ou de dramatisation, ce serait un événement normal, un peu comme un journal... D'autant que j'écris beaucoup de chansons, je n'aurais aucun problème pour produire dans le rythme... Mais disons que ce n'est pas une obsession, c'est seulement ce que je fais : mon boulot, et ça reste un plaisir, c'est bien comme cela.

Le business musical semble obsédé aujourd'hui par les qualités d'enregistrements...

Je me fiche de ça, d'ailleurs je me fiche du business. Il n'a rien à voir avec la musique. Quant à mes enregistrements, ils sont exactement ce que je veux qu'ils soient, avec le son que je veux, sans m'occuper de ce que disent les autres. Parfois, c'est volontairement que je livre un son moins travaillé que ce qu'il pourrait être parce que c'est l'effet sonore que je voulais obtenir. De plus, si tous les disques avaient le même son et la même atmosphère, ce serait plutôt rasoir, non ?

Avez-vous des regrets concernant certains de vos albums ?

De temps en temps, oui... Je regrette certains moments, peu nombreux en fait, parce qu'ils sont moins bons ou parce que j'en espérais mieux... Mais d'un autre côté, ils reflètent ce que j'étais capable de faire de mieux à un certain moment. Je sais bien qu'il y a des imperfections ou des erreurs, mais j'ai appris de ces moments-là aussi. Et les chansons évoluent en ce sens que, selon les jours, on apprécie tel morceau et le lendemain un autre, selon l'humeur...

Votre premier disque s'appelait My Aim Is True. Quel était votre but justement à cette époque ?

C'était juste un titre, pas une déclaration philosophique... mon objectif — plutôt que mon but — à l'époque, était de faire un disque, parce que j'attendais ça depuis pas mal de temps. Je n'avais aucune idée précise de carrière, savoir si ça durerait un an ou cinquante ans... Maintenant, je crois que j'irai jusque vers cent deux ou cent trois ans, puis je commencerai à ralentir un peu (sourire)...

Et comment analysez-vous votre carrière ?

Je ne le fais pas... C'est ça le hic avec ce genre de questions... Ce n'est pas mon boulot d'analyser ce que je fais, plutôt celui des journalistes ou du public. Le faire moi-même ne m'apporterait rien, je connais "mon oeuvre" puisque je l'ai écrite... Et il n'y a rien d'ambigu dans mes chansons. Bien sûr, je pourrais peut-être ressentir certaines choses différemment ou moins apprécier une chanson qu'au moment de sa composition, parce qu'on change, mais le futur m'intéresse beaucoup plus que l'analyse de mon propre passé. Je sais que certaines personnes s'analysent... Moi, je suis plus tenté par la nouveauté, même si c'est à partir de mélanges, d'éléments déjà rencontrés musicalement. On peut construire des chansons, ou entrer dans un monde différent, comme je l'ai fait avec les Juliet Letters, et, là aussi, on est relié à la musique avec son passé.

Et que pensez-vous alors de toutes ces analyses des journalistes sur vos albums, vos compositions, votre carrière ?

Je ne les lis pas toujours... D'abord, je ne peux lire que l'anglais et un petit peu d'italien, donc je n'ai vraiment aucune idée de ce que beaucoup de gens ont écrit sur moi. Et là encore, ce n'est pas mon travail, je ne suis pas journaliste, et je ne lis des articles qu'occasionnellement. Je suis en revanche plus intéressé par les réactions émotionnelles des gens à ma musique, mais très peu de ce que j'ai pu lire, sur moi ou sur d'autres musiciens, correspond à cette émotion que procure la musique. Le plupart des critiques semblent écrire dans le cadre d'une théorie politique ou culturelle, mais pas comme une personne sensible face à des sons ; c'est plutôt désobligeant, même pour le public, car je sais que les gens peuvent avoir une variété de réactions à ma musique. Ainsi,

On a l'impression que depuis quinze ans, vous avez tenté de visiter, musicalement, chaque recoin de ce qu'on pourrait appeler globalement la musique pop...

Oui, c'est sans doute ce que j'ai fait, mais c'est un processus naturel, je suis curieux de différentes musiques à tous niveaux, Par exemple j'ai toujours aimé la country music, mais il m'a fallu du temps, jusqu'à Almost Blue, pour que ce goût soit assez fort pour me donner envie de faire un album de reprises; j'aurais pu facilement faire un album country avec mes propres compositions, mais à cette époque, je n'en avais pas envie. Vous savez, les motivations ne sont pas si complexes : ça n'a rien de mystérieux ou de psychologiquement caché... C'est surtout le plaisir de faire telle musique qui l'emporte à un moment donné... Et cette démarche naturelle est bien loin, parce que plus simple, de toutes les analyses qu'on peut faire (rire)... Et le fait que je travaille d'une façon qui peut paraître plus frénétique ou boulimique que certains n'est qu'une affaire de métabolisme : j'aime la musique, j'ai envie de profiter de sa diversité, et j'espère bien continuer...

Quelle profession indique votre passeport ?

Musicien.

Vous avez beaucoup écrit sur le sentiment de frustration. Considérez-vous la musique comme une forme de thérapie ?

Non, pas dans le sens moderne du mot... Mais la musique peut correspondre parfaitement à un moment d'émotion qui sera mieux supporté : par exemple, dans un moment de tristesse, écouter une chanson qui traite du même sentiment peut, bizarrement, vous sortir de cet état dépressif. C'est le cas du blues, de certains morceaux, même dans la pop music. Beaucoup de morceaux ont cette évidente connection avec un monde "spirituel" disons, sans être forcément religieux. Ce matin, j'écoutais du Beethoven ; je ne suis pas particulièrement religieux, mais cette musique est tellement inspirée par la foi qu'on sent cette inspiration "spirituelle", vitale et émouvante... En ce sens, la musique n'est pas thérapeutique, mais elle a ses effets d'accompagnement, d'émotion, de réconfort, et ce n'est pas toujours confortable ; la musique peut aussi en même temps nous secouer !

Certains musiciens utilisent la musique comme une auto-analyse...

Oui, moi-même, j'ai écrit des chansons très personnelles, mais ce n'est pas forcément fait dans un but d'analyse... Je ne suis pas particulièrement intéressé par moi-même ou l'introspection... Cela a plus à voir avec le fait de tirer de sa propre expérience la matière d'une chanson sincère. mais qui apporte une élaboration musicale... sinon il vaudrait autant chanter son journal intime (rires) !

Comment conciliez-vous cette émotion brute que vous revendiquez et la sophistication grandissante de votre musique ?

D'abord, je ne crois pas que ma musique soit sophistiquée... Peut-être l'est-elle en comparaison de pas mal de productions pop, mais... (silence) Non, je ne suis pas d'accord du tout, ma musique n'est pas sophistiquée. D'ailleurs, même la musique la plus simple peut apporter une émotion qui traduit des sentiments complexes... Par exemple, prenez une chanson comme "I'm So Lonesome I Could Cry" de Hank Williams : elle exprime un sentiment très sophistiqué, mais dit d'une manière tellement simple — phrasé, musique, etc. — que ce n'est pas qu'une chanson triste sur le fait de se sentir seul et triste ! Elle est tout aussi sophistiquée que bien des chansons ou des pièces musicales modernes dites complexes... La différence est dans le média lui-même, et aussi le public qui s'intéresse à l'oeuvre...

Dans les années 1977 à 1982, vous aviez la réputation d'être une personne en colère ; étaitce un engagement social ou politique ?

Je crois que cette colère, on l'a en soi... En même temps, je crois que je ne n'étais pas seulement et nécessairement que cela... Cette envie, on l'a parce qu'on éprouve des sentiments passionnés, avec des vues simples et déterminées... et sans doute aussi un sens de l'agressivité dans certaines chansons. Mais définir ces chansons par la colère seulement est totalement faux et réducteur ! S'il n'y avait eu qu'une seule émotion exprimée, le disque aurait été plutôt insupportable (rire)... Disons que la colère a été, parmi les émotions exprimées, celle dont on a le plus parlé...

Quelle part votre musique puise-t-elle selon vous, dans vos racines celtiques ?

Je ne crois pas qu'il y en ait une... Mon arrière grand-père était certes irlandais et je vis en Irlande aujourd'hui, mais je ne vois pas en quoi cela marquerait ma musique plus que d'autres éléments de ma vie... A-t-on un penchant et des dispositions naturels pour la musique en Irlande ? (rire)... Croire qu'un pourcentage de sang de telle sorte donne un don pour la poésie serait d'un ridicule ! (rire)... Sinon personne ne travaillerait chez nous, et tout le pays chanterait à longueur de journée (rire)...

Beaucoup de vos chansons sont traversées par votre sens de l'humour...

Oui, et sans doute est-ce moins facile à saisir en France à cause de la langue... C'est impossible de démonter le mécanisme de l'humour, sinon ça ne fonctionne plus. Il y a différentes façons de l'exprimer : certaines blagues te secouent et te font pisser de rire, d'autres apportent juste la petite lumière qui fait que la vie est un peu plus supportable. Et dans les chansons, c'est difficile, parce que quand on a entendu la blague une ou deux fois, on se lasse... Mon humour se trouve aussi dans des chansons comme "My Science Fiction Twin", où à l'évidence, le côté fantasque l'emporte sur la réalité, ce qui crée un petit décalage, et si on loupe cela, la chanson peut paraître plutôt mystérieuse ! (rires). Certains morceaux sont plus ouvertement humoristiques, comme "This is hell" sur cet album ou "God's Comic" sur Spike, mais l'humour se perd dans les traductions, inévitablement...

Certains de vos albums ont été ignorés des médias chez nous, comme Almost Blue ou Goodbye Cruel World, et même Spike ou King of America. Or, avec le recul, l'importance de ces disques est évidente dans votre carrière. Savez-vous pourquoi les critiques les ont boudés ?

Je crois que ça prouve leur incroyable manque de goût et l'envergure de leur incompétence (rire)... que puis-je dire d'autre ?

Mais ces albums avaient un lien entre eux...

Oui !... Et vous savez quel lien ? Ces albums ont surtout eu en commun d'être presque totalement ignorés par les média en France (rires)...

Vous sembliez très concerné par l'évolution du rock 'n' roll dans les 80's, beaucoup moins maintenant, pourquoi ?

Je ne suis pas sûr de comprendre la question en relation avec ma propre musique... peut-être que je suis moins concerné par une seule forme de musique, parce qu'avec le temps, il y a plus de possibilités de diversification qui se sont présentées à moi. Mais je n'ai jamais été particulièrement obsédé par l'évolution du rock 'n' roll, d'ailleurs, c'est une forme musicale très limitée, et c'est ce qui en fait sa force en même temps. Mais il y a d'autres formes de création, d'autres apports possibles dans la rythmique ou l'instrumentation qui sont tout aussi intéressants, comme ce que j'ai essayé dans l'album Spike, mais il est vrai qu'en France vous ne l'avez pas remarqué (rires)... En tout cas, ce qui maintient la musique vivante, c'est l'essai de nouvelles sonorités... Mais le rock 'n' roll n'est pas quelque chose qui évolue en soi, ça c'est une invention du magazine Rolling Stone (rires)! C'est comme le Hall Of Fame : si on l'établit, il faut bien y mettre quelqu'un dedans, même quand on a attendu le moment où les gens sont reconnus par tous... quelle idée stupide

Considérez-vous votre album King of America, comme un tournant important dans votre carrière ?

D'une part, c'est un album plein de compassion, de générosité, et d'autre part, c'est le premier pour lequel j'ai travaillé avec beaucoup d'autres musiciens, il y avait donc des apports extérieurs, avec des structures de formes musicales déjà existantes, comme la country, le rhythm'n'blues, les ballades, le rockabilly, etc. On n'a pas cherché à créer de formes nouvelles. De même, quand j'ai fait Almost Blue, j'ai déjà dit que j'aurais pu écrire les chansons en adoptant la forme country tout en cherchant à m'exprimer ; pour King of America, j'en étais plus proche, ce n'est pas un truc pour me déguiser avec un chapeau de cowboy (rires), mais ça correspondait aux sentiments exprimés, la tendresse, les regrets, des émotions qui n'auraient pas correspondu à un rock 'n' roll hurlé... C'est parce que mes compositions sont, dans une inspiration qui peut être presque spontanée, choisies et élaborées de manière consciente.

On sait que vous êtes un proche de T-Bone Burnett, qui a produit "King of America". Que vous êtes-vous appor-té réciproquement ?

On a passé pas mal de temps sur la route et on a eu le temps de dis-cuter le fondement des chansons, ce que les gens appellent la motivation ou la psychologie d'un morceau. On a parlé plus que je ne l'ai fait avec aucun producteur, même pas Nick Lowe qui avait produit un de mes premiers albums... T Bone s'est attaché à l'expression et à l'idée très claire que j'avais de chaque chanson, même si lui ne la réalisait pas exactement, il avait confiance. Et avec T Bone, le côté musical était très simple, il s'agissait d'enregistrer les musiciens sans effets spéciaux, sans production envahissante... Donc, de donner un album très vrai, très direct, qui soit une image très proche de la performance réelle. L'album était plus concentré sur l'expression que sur les circonstances extérieures de sa réalisation.

On a été étonné quand vous avez collaboré avec Paul McCartney ; y avaitil une raison particulière ?

Je ne peux pas contrôler la façon dont les gens perçoivent la carrière de Paul aujourd'hui, et ça ne m'intéresse pas... La raison ? Simplement, on l'a fait, c'est tout, et je suis content car je pense qu'on a fait ensemble deux"ou trois chansons qui sont au moins aussi bonnes que les miennes ou les siennes... Et il n'était pas question de rivaliser avec celles qu'il a composées avec John Lennon ; c'était impossible, ce genre de combinaison n'arrive qu'une fois par vie, quand elle arrive ! Même si on sait aujourd'hui que beaucoup des dernières chansons n'étaient pas directement issues de cette collaboration, les circonstances du groupe étaient vraiment uniques... Pour moi, cette rencontre avec Paul est une occasion de plus de composer et penser différemment.

Vous aimez beaucoup les pseudonymes et les masques, The Imposter, Napoleon Dynamite, Emotionnal Toothpaste etc. Est-ce aussi une marque d'humour ?

Oui, je pense que oui. Les gens ont exagéré l'importance de tout cela ; là encore, il ne faut pas chercher de signification psychologique cachée ! Que penser de Count Basie, Duke Ellington, Johnny Rotten, etc.? Le showbiz a toujours été un monde de faux noms ou de jeux de mots... Et pour présenter quelque chose au public, "Elvis Costello" sonne bien, non ? Même si, parfois, on attache des clichés ou des attitudes au pseudo... Et je ne vois rien d'extraordinaire à prendre un faux nom pour sortir un album, ça secoue un peu les choses, et les gens ont à penser... Mais il n'y a rien de sombre ou de mystérieux làdessous...

En 1989, dans une interview, vous disiez ne pouvoir écrire que sur des sujets tristes et des épisodes dramatiques d'une vie, est-ce encore vrai ?

Je devais exagérer un peu ou avoir dit que ces sujets m'inspiraient plus... Quand on écrit sur soi ou les autres, les situations les plus impressionnantes sont souvent celles qui sont troublantes, dérangeantes, et pas souvent gaies... Encore que même la joie puisse parfois être déstabilisatrice à sa façon.

Qu'avez-vous ressenti face à la critique qui a peu apprécié Juliet Letters, vous reprochant de devenir "sérieux et intello" ?

Vraiment ? Je ne lis pas le français... Mais c'est fascinant ! (rire). Que dire ? D'abord, les critiques n'ont pas acheté l'album et n'ont même pas payé leur place au concert, alors... Quant à l'album, il s'en est déjà vendu un quart de million d'exemplaires, ce qui est considérable pour un disque de musique de chambre. Je n'ai pas de problème avec cette critique. Si elle a envie de démolir l'album, c'est son droit, mais ça n'est pas un gage de vérité pour autant...

Ce serait plutôt un faux procès d'infidélité au rock 'n' roll ?

Je ne sais pas... encore une fois je ne peux pas lire ces articles. Mais, et ce que vous me dites confirme les impressions de mes visites précédentes, l'ensemble de la critique me paraît à la fois faussé et limité dans son appréciation de la qualité en musique. De la même manière, et pour généraliser un peu, les Français pensent que si tu es en train de crever de la came, tu deviens intéressant ; ils trouvent même Jerry Lewis amusant ! Il y a bien sûr une culture française de qualité, mais à côté de cela, cette culture américaine qu'on semble apprécier ici est vraiment du domaine du mystère et de la farce pour le reste de l'Europe. Il faut en être conscient et s'en méfier. Et cette attitude générale se retrouve dans la manière d'aborder Juliet letters. C'est arrivé également en Angleterre, dans une certaine mesure : on m'a reproché d'être sorti de ma petite boîte ! Mais la vie est trop courte à mon goût pour ne pas avoir envie d'autre chose ! J'avais envie de le faire, de travailler avec les gens du quartet Brodski, sans autre prétention que de faire de la musique avec passion ; et ça, c'est notre droit, les critiques peuvent aller se faire mettre, ils n'empêcheront pas des centaines de milliers de personnes d'avoir partagé cette même envie; même si tous n'ont pas aimé le disque, au moins ils ont été concernés, ils ont essayé quelque chose... De même, la tournée mondiale a été un succès et l'atmosphère n'avait rien à voir avec celle que la critique croit voir autour de la musique classique, tout cela est faux ! Et si je conçois à la rigueur que l'album seul ait pu les déconcerter, le succès sur scène prouve que ces critiques n'ont rien compris ou rien perçu. Et de quel droit peuvent-ils prétendre déterminer ce que je dois faire, ce à quoi ils m'autorisent, etc. ? Quelle arrogance de leur part !

Brutal Youth marque-t-il la fin d'une certaine période d'introspection ?

Non, je ne fais pas ce genre d'analyse ou de décision. Pendant que j'écrivais, je pensais aussi à l'enregistrement. J'ai tenté de jouer de tous les instruments que je pouvais maîtriser, puis, en constatant mes limites, j'ai essayé de trouver les meilleurs musiciens pour le faire et il est apparu que c'étaient des gens avec qui j'avais travaillé avant, les Attractions et Nick Lowe. Et bien qu'ayant Mitchell Froom qui a coproduit, l'influence de ces musiciens a été déterminante. Cela n'a rien à voir avec un début ou une fin de phase artistique. A l'évidence, le son de cet album est différent des Juliet Letters ou des précédents. Mais c'est cette diversité que j'aime. Un de ces jours, j'en ferai peut-être un avec des sections de cuivres, ou un album réunissant des compositions que j'ai écrites pour d'autres artistes. Et même si Spike n'a pas été apprécié en France, je considère que c'est un bon album.

Etait-ce facile de retravailler avec les Attractions?

Oui, très facile. On ne s'était pas vu depuis plusieurs années, mais chacun apportait ainsi un peu de nouveauté, de son expérience. Pareil avec Nick Lowe qui tient la basse sur sept morceaux.

"Sulky girl" est évidemment le premier single...

Oui, et il est monté directement 22 dans les charts en Angleterre ! Je ne m'attendais pas à avoir un hit avec un single, parce que ce marché s'adresse plutôt aux jeunes, et je ne crois pas que les jeunes se sentent proches de moi, je n'ai jamais rien fait pour lés séduire, et j'aime l'âge que j'ai. En tout cas, aujourd'hui, on voit des gens de cinquante ans qui écoutent du rock 'n' roll, du Eric Clapton, de la musique intéressante en soi mais un peu "coffee table".

Vous allez tourner ?

Oui, on passe même à l'Olympia cet été, mais on tourne aux USA à partir du mois de mai avant de venir en Europe -Angleterre, Danemark, Pays-Bas, etc. Après, on verra si on a encore envie d'être ensemble ou pas; on s'arrêtera peut-être ou on fera un disque au Japon, je ne sais pas...

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Rock Sound, April 1994


Yves Bongarçon interviews Elvis Costello.

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